Déclaration de Tunis contre le terrorisme
A l’occasion de l’inauguration de l’exposition « Lieux saints partagés », le Président de la république tunisienne, Béji Caïd Essebsi, a pris l’initiative d’élaborer une déclaration signifiant la détermination de la Tunisie à combattre le terrorisme et à promouvoir la concorde entre les civilisations.
Voici le contenu de la déclaration:
Le terrorisme mondialisé fait peser sur nos sociétés des périls sans précédent. Les actes terroristes s’attaquent à tous les peuples, toutes les cultures et toutes les religions sans distinction aucune. Convaincus que cette menace transnationale cherche à nous diviser et que nous devons y répondre par plus d’unité et davantage de solidarité, nous adoptons la présente déclaration, baptisée «Déclaration de Tunis contre le terrorisme et pour la tolérance et la solidarité entre les peuples, les cultures et les religions», pour rappeler l’urgence de prévenir et de combattre le terrorisme, tant localement que globalement, en insistant sur le constat, les convictions et les messages suivants :
- Au nom de la Tunisie, terre ancestrale de tolérance, de pluralité culturelle et religieuse et d’hospitalité, nous lançons un message de solidarité, de soutien, d’affection et de compassion à toutes les victimes du terrorisme, ceux qui sont tombés sur notre sol et au-delà, quel qu’en soit le lieu. Nous condamnons le terrorisme, sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations ;
- Tout acte terroriste relève du crime contre l’humanité. Il détruit la vie d’innocents à travers le monde. Il est injustifiable quel qu’en soit l’auteur, le lieu, ou la motivation et doit être condamné, sanctionné et combattu sans aucune ambiguïté ;
- Le terrorisme se nourrit des frustrations des jeunes, de leur désocialisation, du manque de dignité, de la marginalisation économique, politique, culturelle et sociale, de la mal gouvernance, de la corruption, des violations de Droits de l’Homme, de la confusion entre politique et religieux, du dogmatisme théologique favorisant l’extrémisme, de l’indigence en matière d’éducation à la pluralité, à la tolérance et au respect des différences ;
- Les groupes terroristes pervertissent les croyances religieuses pour cultiver la haine et semer la violence parmi les nations. Plus que nos vies, leurs armes visent les valeurs universelles qui fondent notre humanité commune. Elles visent les droits de l’homme, les libertés fondamentales et la démocratie. Elles menacent la paix, la prospérité, l’intégrité territoriale et la sécurité des Etats et des peuples. Elles entravent leur développement social et économique et compromettent le vivre ensemble ;
- La sécurité, les droits de l’homme, la paix et le développement, sont indissolublement liés et se renforcent réciproquement ;
- Nos politiques culturelles et éducatives, et l’action publique en général, sont appelées à jouer un rôle de premier plan dans le combat face au terrorisme. Elles se doivent de promouvoir la tolérance et d’enraciner les valeurs de paix, de liberté, de pluralité, de dialogue, d’ouverture sur l’Autre et de respect des différences. Elles sont tenues de prévenir toutes les discriminations et de sensibiliser toutes les composantes de la société au respect de ces valeurs à travers des actions et des programmes concrets ;
- Le terrorisme ne peut être combattu efficacement sans s’attaquer à ses fondements conjoncturels et structurels et promouvoir des politiques de développement équitable et d’inclusion sociale, de manière à juguler les sentiments d’exclusion et de marginalisation qui amplifient le sentiment d’injustice et de persécution sociales et qui favorisent la radicalisation ;
- Les jeunes de moins de 30 ans représentent la moitié de la population mondiale et ils sont, souvent et partout, durement touchés par le chômage et le manque de perspectives qu’offrent les politiques publiques, jusqu’ici incapables de les intégrer économiquement, politiquement, socialement et culturellement. Cet état de fait nourrit la radicalisation et fragilise cette catégorie de la population face à la propagande haineuse et pseudo-révolutionnaire que propage le terrorisme mondialisé ;
- La première des priorités de l’action publique consiste à insérer les jeunes à tous les niveaux de la vie sociale et leur offrir un avenir digne de leurs ambitions pour libérer leurs énergies créatrices et en faire notre première ligne de défense contre le terrorisme. Rajeunir et féminiser la vie politique et promouvoir une société inclusive, pacifiée, plurielle et ouverte permet de contrer efficacement le terrorisme ;
- La propagande du terrorisme mondialisé utilise efficacement internet et les réseaux sociaux. Une contre-offensive sur ce même terrain devrait être organisée pour déconstruire cette propagande et combattre les incitations à la haine et à l’action violente et prévenir les recrutements. Par leur maîtrise de ces moyens de communication moderne, les jeunes sont nos meilleurs alliés dans ce combat. La société civile, les médias, les victimes du terrorisme, leurs familles et leurs représentants, les responsables religieux et tous ceux qui contribuent de quelque manière que ce soit à façonner l’opinion, sont appelés à y contribuer pleinement ;
- En vertu du droit national et international, la justice s’engage à appréhender, poursuivre et sanctionner toute personne responsable d’actes terroristes, y compris sur les plans de la conception, de la préparation, de l’organisation ou du financement. Comme toute justice agissant en démocratie, elle est tenue de veiller à la primauté du droit et au respect de notre Constitution et des normes internationales en la matière ;
- Le terrorisme mondialisé est une menace transnationale qui ne peut être jugulée que grâce à une pleine et entière coopération entre tous les Etats dans tous les domaines qu’exige ce combat. Face à un péril commun, la réponse doit être locale, collective et globale. La paix dans le monde ne peut être obtenue et raffermie que grâce à la solidarité de la communauté internationale.